Imaginez l'émotion ressentie par tout cinéphile à l'annonce de l'association de Snyder et Nolan (l'un à la réal, l'autre instigateur de l'histoire et à la prod) sur un même film. Quand on connait le cursus de chacun des gus ça a le don de monter le baromètre d'excitation au maximum. Entre un Snyder souvent applaudi pour son image (et parfois injustement décrié sur ses scénarios) et un Nolan maître du blockbuster "d'auteur" exigeant, le duo fait fantasmer. Oui sauf que...
Sauf que le film sur lequel leurs noms sont associés n'est ni plus ni moins que le (nouveau) reboot d'une saga culte mais casse gueule ; "Superman" ou le héros le moins intéressant de la planète comics... Mais n'oublions pas que c'est le doyen de tous les autres super-héros, donc on respecte quand même l'héritage. Après une renaissance avortée en 2006 avec un "Superman returns" faiblard (pourtant aux mains de Bryan Singer), on se dit qu'il y a du boulot pour adapter un héros quand même très kitsch et dépassé.
Sauf que Snyder est en perte de vitesse à Hollywood (après l'échec injuste de "Sucker Punch") et que Nolan est plus là pour apposer son nom que vraiment un acteur du projet ; trop occupé sur le 3ème volet du "Dark knight" il n'a finalement qu'apporter l'idée originale et pas grand chose de plus... Mais Warner a forcément trouver plutôt utile de mettre en avant ce nom pendant la campagne promo quand on sait comment lui et son scénariste (David S. Goyer ici aussi scénariste) avaient sû faire renaître le Batman après l'ère Joel Schumacher.
Bref pas gagné d'avance.
Le film se divise clairement en 2 parties radicalement différentes ; dans les 2 premiers tiers le film se sort habillement des redîtes de ce qui s'est fait avant. Il évite la bio linéaire en construisant le récit sur de subtils flash-backs. On regrettera quand même la volatilité de certains passages, trop rapides pour réellement emporter le spectateur ; le film, sans jouer la carte de l'action, ne se pose paradoxalement pas beaucoup et ce n'est pas l'acteur Henry Cavill, trop froid, qui réussira à faire gagner de l'empathie envers un Clark Kent sans véritable relief. Pourtant dans quelques rares moments, surtout ceux avec le père adoptif joué par un Kevin Costner surprenant et touchant, le film arrive à gagner en substance. Dommage que ces bons moments soient noyés dans une morale et imagerie quasi-christique plombante et prétentieuse. Car le film se veut (sans l'être) plus l’héritier d’un « Dark knight » que des « Superman » de Richard Donner. Il assume d’ailleurs peu le lourd héritage du super-héros ; le terme « Superman » n’est utilisé qu’avec discrétion et jamais directement (le film en joue d'ailleurs), le logo et costume ne sont qu’un héritage de sa planète d’origine (et non sa création) et son slip rouge est resté au placard. Certains y verront un signe de modernité quand d’autres y verront un manque de courage face à l’adaptation du comic là où le Batman by Nolan assurait l’héritage et la modernité à la fois. Alors oui le beau traitement de l’image si cher à Snyder (caméra épaule, désaturation) fait le job côté dépoussiérage, même si comme souvent il énervera certains. On notera que certains tics de Snyder sont absents : aucun ralenti par exemple ! Ça ne paraît pas grand-chose mais c’est comme voir un film de J.J. Abrams sans flare cette affaire ! Au lieu de ça il insère des zooms brutaux à la manière de ce qu’il avait fait dans 300. Plutôt efficaces mais un brin trop utilisés.
Puis vient une 2ème partie qui opte, elle, pour la surenchère d’action ; et quand je dis surenchère c’est faible ; on va dire plutôt un carnage. Dans tous les sens du terme d’ailleurs. A trop vouloir fournir des séquences épiques, le film ruine tout et détruit une ville entière sans le moindre recul. C’est même parfois laid (les SFX douteux parfois) et surtout débile. Le combat final se rapproche plus d’un duel final d’un épisode de BioMan ; ils se foutent sur la gueule en faisant tomber des buildings par douzaine. Ça n’a aucun souffle et rien ne sort de ce carnage éprouvant pour le spectateur. Même Micheal Bay et son « Transformers 3 » faisait (largement) mieux et plus soft dans son final apocalyptique. Au final ça fait un peu "j'ai dépensé sans compter" et livraison pour coller au genre du film estival.
Trop prétentieux et désincarné, ce « Man of Steel » déçoit partiellement dans un premier temps, puis achève le spectateur dans un brouhaha visuel inutile et sans relief (sauf cette foutue 3D inutile). Encore un gros film attendu qui déçoit. Décidemment 2013 n'est pas l'année des sagas...
Film vu en numérique 3D VOST, Pathé Boulogne